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23 mai 2012 3 23 /05 /mai /2012 15:00

NO EXIT - NICOLAS SARKOZY-et la France-PEUVENT-ILS TROUVER UNE ISSUE A LA CRISE EUROPEENNE ?, par Philip Gourevitch

Allia, 2012

 

Le petit livre noir qui ne vous apprend rien

gourevitch - no exitDans la mesure où l’on a déjà tout lu et tout entendu sur Nicolas Sarkozy, le petit livre commis par Philip Gourevitch, No exit, ne révèle rien. Ni dans les faits, qui sont connus, ni dans l’esprit, qui épouse l’image que l’on se fait, en France comme ailleurs, de celui qui, au moment de la publication de ce livre, n’avait pas encore quitté l’Elysée. Le sous-titre de No exit, « Nicolas Sarkozy – et la France – peuvent-ils trouver une issue à la crise européenne ? », correspond sans doute à l’esprit originel de cet opuscule, publié sous forme d’article dans The New Yorker le 12 décembre 2011 puis revu et augmenté pour une publication sous forme de livre. Il paraît un peu décalé à la lecture de l’opuscule entier, où la crise européenne ouvre et ferme le bal mais dont l’essentiel est constitué en fait par une narration du quinquennat de Nicolas Sarkozy.

Car c’est bien au personnage Sarkozy que s’intéresse Gourevitch. Sa personnalité, d’abord, résumée en quelques phrases, de lui-même ou d’observateurs plus ou moins impartiaux. Son rapport à l’argent, à l’ambition, à l’amour, aux « humiliations » de l’enfance sublimées par le succès ultime ; sa conception du pouvoir, décomplexée, exclusive, autoritaire ; son culte de l’action primant sur l’idéologie. Tout cela, Gourevitch le rappelle, l’illustre, le commente, en retraçant rapidement le parcours du jeune maire de Neuilly devenu ministre, chef de l’UMP et finalement Président. Puis il se livre à un recensement des « moments forts » du quinquennat, du dîner du Fouquet’s au discours de Grenoble, des infirmières bulgares à la guerre en Lybie, du « travailler plus pour gagner plus » aux « affaires » – sans oublier la partie people, Cécilia, Carla, le yacht de Bolloré et les vacances à Louxor. On perd alors de vue la question de la crise européenne pour se focaliser sur la cohérence (ou l’incohérence) de la politique de Sarkozy, sans trop savoir si elle est censée expliquer sa gestion de la crise européenne, ou répondre à la question posée par le sous-titre. Au travers de Sarkozy – ou en parallèle de son parcours – se dessine le désarroi de la France, à la recherche d’une identité nouvelle depuis que la sujétion à l’Europe lui a retiré une part de sa souveraineté. Et de là les réponses sarkozyennes et lepénistes à cette inquiétude, et le constat d’échec d’une Europe qui se refuse à mutualiser sa dette et s’arc-boute, avec l’Allemagne, dans l’exigence de la rigueur budgétaire.

Ecrit pour le public américain, le livre de Gourevitch n’apprend donc rien au lecteur français. Il accorde une grande importance à l’aspect people du quinquennat de Nicolas Sarkozy, non seulement sa vie privée mais ses rapports avec des figures comme Bernard Henri Lévy et Dominique de Villepin. Hélas, il résulte de tout cela une impression de fourre-tout dont on se demande en quoi exactement elle éclaire la question de la crise européenne. Non que le livre soit dépourvu d’intérêt ; il est d’une lecture agréable (malgré des tournures approximatives, mais on en rendra responsable la traductrice) et rapide, il « campe » bien le « personnage » qu’il prend pour objet, et sans doute remplit-il efficacement la fonction de « rappel » avant l’élection présidentielle de 2012. Mais on n’y cherchera pas une étude approfondie de la crise qu’il prend pour prétexte, pas plus d’ailleurs qu’une réflexion nouvelle sur Nicolas Sarkozy.

Thierry LE PEUT

 

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