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17 juin 2009 3 17 /06 /juin /2009 07:42

TERMINATOR RENAISSANCE, de McG
en salles depuis le 3 juin 2009

Ce n'est pas le futur dont ma mère
m'avait parlé

Alors que les trois opus de la trilogie Terminator (qu'il faudra bientôt appeler la "première trilogie") se déroulaient dans notre présent (à peu près), Terminator Renaissance déplace l'action à une période qui n'avait été explorée jusqu'ici que par des flash forward dans les précédents titres. Nous sommes en 2018, la guerre contre les machines a commencé depuis quatorze ans (au terme de Rise of the Machines, le troisième film, réalisé par Jonathan Mostow en 2003) et la configuration de la Terre a radicalement changé. Le film de McG, dont le scénario a été écrit par John D. Brancato et Michael Ferris déjà à l'oeuvre sur Rise of the Machines, élargit le champ restreint des précédentes incursions dans l'avenir de l'humanité et dévoile le champ de bataille global qu'est devenue la planète. Cet élargissement installe une réalité quasi alternative qui rompt avec le visuel établi par James Cameron dans le Terminator d'origine, optant pour les couleurs désaturées et une réalisation "à l'arraché" inspirée par La Chute du faucon noir et les blockbusters d'action récents comme La mémoire dans la peau et Casino Royale. Le scénario délaisse également le schéma récurrent de la trilogie originelle - le film de poursuite - pour s'établir de plain-pied dans celui du film de guerre. C'est en ce sens qu'il s'agit bien d'une renaissance.

En choisissant Christian Bale pour incarner le nouveau
John Connor (après Edward Furlong dans Terminator 2 et Nick Stahl dans Rise of the Machines), McG choisit par ailleurs de s'inscrire dans la mouvance de Batman Begins, donc d'un reboot réussi, ayant imposé un nouvel univers après ceux de Tim Burton et de Joel Schumacher. Le choix du comédien amène en outre une exigence de qualité, Bale s'impliquant de manière significative dans l'écriture du film, condition sine qua non de sa participation.

Cameron n'ayant pas participé à cette renaissance, McG fait un autre choix significatif, de nature à ancrer son film dans l'univers du fondateur de la "franchise" : celui de la citation. Elle est évidente dans l'apparition d'un Schwarzenegger de synthèse au cours du combat final - "incarnation" du T-800 dont Renaissance est censé dévoiler la toute première apparition - mais nourrit en fait l'ensemble du métrage. McG ne cite pas seulement la franchise, par le biais de répliques cultes ("Viens avec moi si tu veux vivre", "Je reviendrai"...) ; il fait aussi un usage conséquent de l'imagerie d'Aliens, imposant l'idée qu'il rend hommage à Cameron et pas seulement à la trilogie originelle de Terminator. Tout le dénouement est une longue référence à Aliens, au point de passer même pour un remake, ce qui pousse un peu loin le parti pris de l'hommage. Le cadre (un complexe souterrain vieilli, obscur, brumeux où sont tapies les "créatures"), les péripéties (le monte-charge, l'alarme, le torse de Connor transpercé par derrière) sont repris d'Aliens, avec une touche de Star Wars Episode 2 : L'Attaque des Clones (le combat au coeur même de la chaîne de fabrication des robots). Le personnage de la petite fille plus ou moins muette qui accompagne
Kyle Reese est également une réminiscence de Newt dans Aliens, tandis que les poursuites sur les routes d'un désert post-apocalyptique invoquent le spectre de Mad Max. Importante également est la présence de machines "collectrices", qui saisissent les humains à l'aide de bras téléscoipiques pour les jeter dans des nacelles avant de les conduire dans des camps où ils sont parqués ou triés : c'est cette fois du côté de Spielberg et de sa Guerre des Mondes que lorgne McG, jusqu'à la sirène qui annonce l'arrivée des machines et au bruitage sonore, pesant, qui accompagne leurs déplacements. Bref, les références sont nombreuses, reconnues ou non, et constituent un bagage pesant qui ne permet pas à Renaissance de s'imposer comme un "reboot" original. Sans aller jusqu'à la maladresse d'un Superman Returns, suite et remake à la fois, Terminator Renaissance impose une relecture de la franchise, mais une relecture encore bien trop tributaire de ses influences.

Est-ce à dire que Terminator Renaissance est un ratage ? Non. Loin de là.

Le grain "à la Faucon Noir" s'accorde tout à fait à la dureté du ton : délibérément, McG a écarté l'humour de ce premier opus, de manière à établir la tonalité dramatique de la nouvelle trilogie, en s'écartant du ton parodique employé par Jonathan Mostow dans certaines scènes de Rise of the Machines. A l'opposé, le film ne s'aventure pas non plus dans le ton philosophico-mystique des Matrix, préférant la voie médiane, celle du rapport frontal à la thématique de la guerre. L'ouverture de Renaissance montre ainsi une opération-commando menée avec des hélicoptères par des soldats armés de pied en cap : la guerre version McG n'est pas seulement une guerre de guérilla comme le suggérait la précédente trilogie, mais une guerre de grande ampleur où les hommes disposent d'un arsenal puissant (hélicoptères donc, mais aussi sous-marins, avions de chasse, armes de poing, etc.), soutenu aussi par des ordinateurs, ce qui implique que le réseau
SkyNet, bien que planétaire, ne contrôle pas tout. Le film n'explique pas la présence de tout cet arsenal, plaçant le spectateur devant le fait. Du côté des machines, Renaissance innove également. Le T-800 (modèle du Terminator du premier film, en 1984) n'existe pas encore : sa conception est révélée dans la séquence d'ouverture et effective dans le dénouement. A fortiori, pas de T-1000 ni de Terminatrix. Le modèle de base des robots "humanoïdes" est donc le T-600, entièrement mécanique, auquel le film apporte des aménagements qui le rendent encore plus menaçant que dans la première trilogie, le personnalisant par des armements, des "visages" et un habillage différents. On découvre aussi des machines inédites, spécialement la motoTerminator et les hydrobots, ces derniers prenant la forme de serpents d'eau dont la tête munie de pinces se jette au visage de leurs proies (autres références difficiles à ignorer, celles des face huggers de la saga Alien et des Sentinelles de Matrix). Chacune de ces innovations joue un rôle central dans au moins une scène du film, s'intégrant ainsi à l'histoire à la manière des différents concepts-gadgets des Star Wars. La remarque peut s'interpréter bien sûr de deux façons : ces innovations dynamisent le film et participent de la volonté de créer un "futur" autrement plus ample que celui des précédents flash forward, mais en fonctionnant comme des gadgets elles installent aussi, d'une part un univers "à la Lucas" où l'objet a autant d'importance que le personnage humain (sinon plus), d'autre part une construction dramatique faite de passages obligés, de scènes d'action enchaînées où la surprise vient de ces objets et non des personnages.

Bien sûr, dans les propos de McG, ces derniers tiennent la vedette. Le réalisateur, comme tant d'autres avant lui, insiste sur le fait que les effets spéciaux sont au service des personnages et de l'histoire, non l'inverse. Pas de bon film sans des personnages intéressants. L'implication de Christian Bale dans l'écriture est traitée dans les interviews comme une garantie d'exigence de ce point de vue, de même que la participation de Paul Haggis ; en outre, le film s'ancre à un personnage inédit, celui de Marcus Wright, qui, justement parce qu'il n'est pas encore connu, prend le pas sur celui de John Connor, dont on n'attend pas de surprise. La séquence liminaire du film montre Wright en prison, où il attend son exécution, acceptant de donner son corps à la société Cyberdyne pour servir à un projet confidentiel. On le retrouve au terme de la séquence d'ouverture guerrière, lorsqu'il émerge des décombres d'un site contrôlé par SkyNet. On sait donc qu'il fait partie d'un projet, voire d'un plan, conçu par SkyNet, mais son attitude ensuite semble contredire l'idée qu'il est le "méchant" de l'histoire, l'adversaire à venir de John Connor. La réalité est autrement plus complexe et l'histoire tourne très vite autour de ce mystère. L'idée est salutaire, car elle donne son identité au film : face à ce mystère, John Connor ne comprend plus, car les cassettes enregistrées laissées par sa mère Sarah Connor (et lues par Linda Hamilton dans la VO - la voix française de la comédienne est également respectée) ne font aucune allusion à ce qu'est Marcus Wright. Comme si le futur annoncé et le futur réalisé n'étaient brusquement plus le même, ce qui ouvre la voie à une plus grande liberté de la nouvelle trilogie à l'égard de la trilogie originelle.

Le traitement de Kyle Reese était en revanche l'un des éléments attendus de Renaissance. En ancrant son histoire dans la guerre contre les machines, entre le passé de la première trilogie et le futur annoncé, où Kyle Reese est envoyé dans le passé pour sauver Sarah Connor et permettre la naissance de John, Renaissance promet au public de lui dévoiler un Kyle Reese encore adolescent, avant sa rencontre avec John Connor. Anton Yelchin, également choisi pour être le jeune Chekov de Star Trek dans la version nouvelle de J.J. Abrams, incarne le jeune homme. Mais le personnage, avant de rencontrer Connor, entre principalement en interaction avec Marcus Wright, qui joue auprès de lui le rôle d'un "grand frère" en lui enseignant quelques notions de prudence et d'efficacité au combat ; c'est une autre surprise bienvenue du film, qui reporte ainsi la rencontre de Reese avec Connor au dénouement, en faisant un enjeu majeur du film puisque Connor, connaissant le rôle de Reese dans le futur (et le passé...) mais ne l'ayant pas encore rencontré, est préoccupé de le trouver et d'empêcher sa mort. Car SkyNet connaît aussi l'importance de Reese et le recherche pour le tuer.

Tout amateur de science-fiction le sait : dès lors qu'il est question de voyage dans le temps et donc de paradoxe temporel, l'histoire devient complexe. C'est l'une des raisons pour lesquelles McG ne voulait pas que le voyage dans le temps intervienne dans Renaissance, préférant situer le récit avant la découverte de la technologie qui le rendra possible, à charge à la suite de la nouvelle trilogie de raconter cette découverte et ses conséquences. De fait, Renaissance a suffisamment d'éléments à mettre en place pour que le choix de McG apparaisse justifié. Ce sont la séquence liminaire mettant en scène Marcus Wright et la scientifique de Cyberdyne puis les cassettes de Sarah Connor qui assurent le lien avec les autres époques impliquées par la franchise Terminator.

Terminator Renaissance relance donc avec un certain bonheur la franchise Terminator. Non que la perfection soit atteinte, notamment parce que l'univers mis en place manque encore d'autonomie ; mais les personnages sont suffisamment bien campés pour poser les bases d'une continuité appelée à se poursuivre dans au moins deux titres supplémentaires. Le deuxième, McG l'a déjà annoncé, devrait envoyer John Connor dans le passé, la découverte de la technologie nécssaire au voyage dans le temps étant au coeur du scénario. Ce n'est pas forcément une excellente nouvelle mais il est trop tôt pour enlever aux scénaristes la confiance qu'ils ont gagnée en ficelant très honorablement ce premier opus de la nouvelle trilogie. Il suffit d'attendre et, avant la venue d'une suite, de revoir ce film pour continuer d'en explorer les réussites, et d'en peser les carences.  TLP

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commentaires

B
Ma chère Sandra, je suis grand amateur d'histoires et j'aime tous les styles ; les films d'action ? j'adore, si l'histoire est bonne !
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S
bonjour m., je ne pensais pas que vous regardiez ce style de film; vous m'impressionnez
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B
Long, en effet ; mais je ne compte pas, car j'aime écrire et le faire permet de garder une trace durable des impressions procurées au moment de la vision du film. Merci pour votre commentaire !
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L
c très intéressant mais surement très long a faire.Enfin j'aime bien.^^
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